Les programmes Espace Transition (ET) sont fondés sur l’intégration de divers constats et considérations concernant la situation des jeunes aux prises avec des problèmes de santé mentale et la façon de les soutenir, dont les principaux sont résumés ci-dessous, accompagnés de références non exhaustives :
Chaque programme niché sous ET vise des objectifs spécifiques propres, mais tous partagent les objectifs suivants :
L’expérience collective est centrale aux programmes ET, qui reposent sur le postulat que l’intégration sociale est un moteur crucial du mieux-être, de l’adaptation et de la déstigmatisation. Ainsi, tous les programmes ET préconisent la modalité de groupe et impliquent la réalisation d’un projet collectif.
Les programmes ET ciblent des jeunes de 14 à 25 ans, d’une part dans le but de pallier la rupture de services survenant fréquemment au moment du passage de l’adolescence à l’âge adulte et, d’autre part en raison du constat de plus en plus reconnu que les adolescents et les jeunes adultes partagent de nombreux besoins et caractéristiques (Arnett, 2000).
Par ailleurs, poursuivant des objectifs communs à l’ensemble des personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale et misant sur le développement de leurs forces plutôt que sur la réduction de symptômes ou déficits spécifiques, les programmes ET desservent des groupes de jeunes présentant des troubles mentaux variés.
Enfin, les groupes de participants aux programmes ET incluent toujours une proportion de jeunes ne présentant pas de problème de santé mentale ou d’adaptation significatif. La composition mixte des groupes permet aux jeunes aux prises avec un problème de santé mentale d’évoluer aux côtés de pairs au fonctionnement plus normatif et ce, sans être d’emblée identifiés comme souffrant d’une psychopathologie, la condition psychiatrique de chaque participant n’étant pas divulguée par les responsables cliniques aux autres membres du groupe ni aux animateurs des ateliers.
La mixité des groupes permet également aux jeunes ne présentant pas de psychopathologie de côtoyer de près des pairs qui en souffrent et à modifier conséquemment leurs perceptions et attitudes à l’égard des problèmes de santé mentale (Twardzicki, 2008; Heenan, 2006; Institute of Public Policy Research, 2003).
Les programmes ET ne recourent pas aux outils traditionnels des approches psychothérapeutiques et sont généralement animés par des artistes non-cliniciens, spécialistes du médium créatif mis de l’avant (ex. percussionnistes professionnels dans le cas d’ateliers musicaux). Ils sont par ailleurs le plus souvent livrés hors des établissements de soins, soient dans des locaux communautaires (ex. YWCA) ou rattachés à des centres artistiques (ex. conservatoire de musique de Montréal). Les programmes sont enfin offerts le soir ou la fin de semaine de sorte à interférer le moins possible avec l’engagement dans des activités scolaires ou professionnelles. L’ensemble de ces considérations offre aux participants la possibilité de vivre une expérience «normalisante», qui tienne compte de leur sensibilité particulière à la stigmatisation et de leur désir de se dissocier des structures de soins conventionnelles.
Ce contexte stimulant les invite également à découvrir, acquérir et valoriser des habiletés puisqu’il met en lumière le potentiel de chacun plutôt que ses difficultés. Il a été suggéré que de telles expériences de normalisation et de réussite sont notamment susceptibles d’améliorer la perception de soi et le fonctionnement quotidien des participants, en plus de favoriser leur adhésion aux programmes (Archambault et al., 2012; 2014; Heenan, 2006; Macnaughton et al., 2005; Webster, Clare, & Collier, 2005; White, 2004).
Malgré la valorisation du contexte normalisant des interventions, l’offre d’un environnement sécurisant constitue une composante essentielle des programmes ET, qui entend favoriser que les participants s’adonnent aux différentes expériences leur étant proposées avec le moins de risque possible et en tirent ainsi des bénéfices optimaux. Des efforts de sensibilisation et de modélisation sont donc consentis par l’ensemble des acteurs des programmes afin de faire régner au sein des ateliers un climat respectueux, dans lequel les participants peuvent se sentir libres et confiants d’être eux-mêmes, d’expérimenter et de se tromper, sans crainte d’être jugés. Par ailleurs, un accompagnement clinique adapté au contexte normalisant mis en place et modulé en fonction des besoins de chaque participant est systématiquement prévu. Celui-ci est assuré par la présence constante d’un intervenant professionnel ou en formation, qui offre du soutien direct aux participants en cours d’ateliers et entre ceux-ci au besoin.
L’accompagnateur relaye également les informations cliniques pertinentes aux intervenants traitants des participants. Une psychiatre assure en outre la supervision clinique de l’ensemble des programmes de sorte que des interventions appropriées soient rapidement mises en place lorsque nécessaires.
Les programmes ET emploient divers médiums de création comme principales modalités d’intervention et ce, dans la logique des approches «arts in health» ou «arts for health». Contrairement à l’art-thérapie, qui constitue une forme de psychothérapie recourant aux médias artistiques pour faciliter l’élaboration et l’expression des pensées et affects (Association des Arts-thérapeutes du Québec ; Collie, Bottorff, Long, & Conati, 2006), ces approches conçoivent le processus de création artistique comme recelant en soi d’un potentiel thérapeutique (Argyle et Bolton 2005 ; Broderick, 2011 ; Collie et al., 2006; Heenan, 2006; Macnaughton, White, & Stacy, 2005; Van Lith, Fenner, & Schofield, 2011).
La création d’une œuvre collective et le partage de cette réalisation avec des individus extérieurs (ex. représentation de spectacle, vernissage) sont des caractéristiques centrales aux programmes ET, la plus-value thérapeutique de telles composantes ayant été suggérée. Par exemple, la création d’une production artistique tangible a été associée au développement d’un sentiment de maîtrise et d’accomplissement accru par rapport à la pratique artistique sans finalité (Argyle & Bolton, 2005; Heenan, 2006; Lloyd et al., 2007; Snow et al., 2003; Tate & Longo, 2002). La représentation d’une œuvre devant public semble pour sa part avoir le potentiel de catalyser l’amélioration de la perception de soi et la réduction de la stigmatisation des participants en favorisant leur propre réalisation de leurs accomplissements et en permettant à leurs familles, amis et aux membres de la communauté de constater ces mêmes accomplissements (Snow et al., 2003; Spandler et al., 2007; Stickley et al., 2007). Lorsque collective, la production d’une œuvre artistique et sa représentation seraient en outre susceptibles d’entrainer des gains supplémentaires au niveau social, entre autres en accroissement la cohésion de groupe et en suscitant le développement d’habiletés de coopération (Archambault et al., 2014).
RECHERCHE
Dès les premières étapes de mise en œuvre -souvent même de création- des programmes ET, une démarche de recherche collaborative leur est systématiquement associée afin d’en évaluer la sécurité, la pertinence et l’efficacité et d’en soutenir l’amélioration, la pérennisation et la diffusion.
L’éthique, la rigueur scientifique, la collaboration symétrique avec les partenaires, dont les participants aux programmes, et la centration sur l’utilité concrète des résultats sont des principes guidant les activités de recherche réalisées dans le cadre d’ET.
L’art au service de la santé
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